L'important chantier du grand âge
On ne peut que regretter le retard pris par l’État pour anticiper la prise en charge du grand âge et particulièrement l’arrivée massive des baby-boomers dans les catégories touchées par la dépendance. Nous serons plus de 19 millions à avoir plus de 65 ans en 2040.
Situation de la France vis-à-vis des personnes âgées
On ne s’installe plus dans la vieillesse comme avant. Pour beaucoup, être âgé, est synonyme de perte d’autonomie et là, le chantier est immense. Vivre dans la dignité est une question aussi importante que la fin de vie. Il faut changer la vision de la société à l’égard des aînés et de leurs aidants, proches et professionnels, et garantir un soutien évolutif en fonction des pathologies liées au grand âge.
Les cartes sont, désormais, dans les mains d’Aurore Bergé, la ministre des Solidarités, et l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (l’UNCCAS) a fait des propositions dans son livre blanc. Aujourd’hui, quand arrive le moment de fragilité, quand on a besoin d’aide pour une personne âgée, on vous parle un langage souvent incompréhensible.
Simplification, lisibilité, transparence
Il manque un guichet unique, évitant d’avoir à frapper à toutes les portes. Et l’UNCCAS, association de maires et d’élus, dont la proximité est le quotidien, y est particulièrement attentive. Ce service public territorial de l’autonomie devrait bientôt voir le jour. Avec trois impératifs : simplification, transparence et lisibilité partout où l’on se trouve. Dans dix départements volontaires, il sera examiné comment l’examen de l’offre se structure avant une généralisation dans le pays à partir de ce qui est probant.
On attend toujours la loi grand âge promise par Emmanuel Macron et sans cesse reportée. Quel sera le contenu de ce texte ?
Il faudra une réelle volonté de faire et du courage, c’est-à-dire un vaste plan d’actions qui passe en partie par la loi, y compris celle des finances de la sécurité sociale. S’il y a un besoin urgent d’argent, il faut surtout réformer un modèle économique qui est à bout de souffle : les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) vont très mal et les services d’aide à domicile aussi.
La plupart des aînés aspirent, aujourd’hui, à vieillir chez eux
Il va donc falloir multiplier ces aides à domicile. Les métiers de l’aide aux personnes âgées ne sont pas ceux qui attirent le plus. Pour autant, toutes celles et ceux qui les pratiquent y trouvent du sens. C’est important, mais forcément insuffisant. Les questions de la revalorisation salariale et de la formation à ces postes sont évidemment incontournables, et les plans d’aides doivent être multiples pour équiper les logements et lutter contre l’isolement dont on ne parle pas assez.
Les Ehpad vont mal. Ils peinent à garder leurs infirmiers, leurs aides-soignants.
Il faut revoir ce mode d’hébergement, souvent contraint, pour y encourager la vie. C’est une question d’image et de moyens y compris humains, le personnel étant la clé du bien-être. Il y a des initiatives pertinentes d’Ehpad qui s’ouvrent sur les quartiers, accueillent des jeunes en service civique, des bénévoles… Certains résidents ne voient que trop rarement leurs enfants, petits-enfants, proches… Ne pas avoir de visites, c’est la double peine pour les personnes âgées.
Entre le maintien à domicile et l’Ehpad, d’autres modes d’hébergement apparaissent
L’habitat partagé accompagné, l’accueil familial, la cohabitation intergénérationnelle, les résidences dédiées… commencent à se développer. C’est intéressant. l’Ehpad est souvent considéré comme la solution ultime. Mais l’Ehpad qui se réinvente peut aussi devenir un accueil de jour, un espace de répit, le temps de quelques semaines, pour les aidants accompagnant un parent atteint par la maladie d’Alzheimer, par exemple.
Les familles se heurtent souvent à un véritable casse-tête pour trouver une place d’hébergement pour leur parent malade d’Alzheimer.
Ce sont souvent des mois, des années de recherches vaines… Il est urgent d’intégrer de plus en plus d’espaces protégés dans les Ehpad, de créer de petites structures dédiées. Il est impératif également de constituer des équipes pluridisciplinaires pouvant intervenir à domicile, notamment au bénéfice des malades d’Alzheimer jeunes. Il est inconcevable de mettre une personne de 50 ans dans un Ehpad.
Un Ehpad modèle, ce serait quoi ?
Ce serait de petites unités de vie pouvant s’ouvrir sur l’extérieur, dotées d’un jardin thérapeutique, de lieux où l’on stimule les capacités, d’un espace familial… Et où les professionnels sont reconnus et suffisamment nombreux.
L’importance des aidants familiaux
Des progrès ont été faits. Il y a encore quelques années, ces aidants n’avaient ni reconnaissance, ni écoute. L’impératif, si l’on veut agir efficacement pour ces aidants, est de repérer leurs fragilités et d’éviter leur épuisement. Il faut donc les protéger et les soutenir, leur donner des clés afin de frapper à la bonne porte pour obtenir un soutien, y compris psychologique.
Les choses avancent pour le grand âge certes, mais quel retard pris !
Finir sa vie dans la dignité est un impératif. Il faut maintenant accélérer. Tout est prêt. Des propositions concrètes sont prêtes. Il faut l’accord de l’état pour avancer et reconnaître qu’il s’agit d’une grande cause nationale pour la population vieillissante.
J-P.B